Lorsque le dernier arbre
de Michael CHRISTIE
4ème de couverture :
« Le temps ne va pas dans une direction donnée. Il s'accumule, c'est tout - dans le corps, dans le monde -, comme le bois. Couche après couche. Claire, puis sombre. Chacune reposant sur la précédente, impossible sans celle d'avant. Chaque triomphe, chaque désastre inscrit pour toujours dans sa structure. »
D'un futur proche aux années 1930, Michael Christie bâtit, à la manière d'un architecte, la généalogie d'une famille au destin assombri par les secrets et intimement lié à celui des forêts.
2038. Les vagues épidémiques du Grand Dépérissement ont décimé tous les arbres et transformé la planète en désert de poussière. L'un des derniers refuges est une île boisée au large de la Colombie-Britannique, qui accueille des touristes fortunés venus admirer l'ultime forêt primaire. Jacinda y travaille comme guide, sans véritable espoir d'un avenir meilleur. Jusqu'au jour où un ami lui apprend qu'elle serait la descendante de Harris Greenwood, un magnat du bois à la réputation sulfureuse. Commence alors un récit foisonnant et protéiforme dont les ramifications insoupçonnées font écho aux événements, aux drames et aux bouleversements qui ont façonné notre monde. Que nous restera-t-il lorsque le dernier arbre aura été abattu ?
Fresque familiale, roman social et écologique, ce livre aussi impressionnant qu'original fait de son auteur l'un des écrivains canadiens les plus talentueux de sa génération.
Si après avoir lu cette 4ème de couverture, vous vous dites le côté "fin du monde" d'une histoire qui se passerait dans le futur, ce n'est pas pour moi; je dis Stop ! Lisez la suite. Non, clairement ici, c'est plutôt une histoire du passé. Les quelques pages de 2038 sont un tremplin pour nous plonger en 2008, en 1974, en 1934 et même en 1908. Avec un vrai talent, l'auteur nous fait faire des sauts dans le temps, d'abord en arrière, puis en avant, sans nous perdre, en gardant notre intérêt et notre soif d'en savoir plus sur cette lignée.
Les personnages sonnent justes, tous. On découvre leur évolution, pourquoi leur vie a pris telle ou telle direction. On est à leur côté quand ils sont confrontés à un choix, même s'ils ne se rendent pas compte des répercutions qu'il aura dans les prochaines décennies. Il y a tellement de choses dans ce roman : 2 frères fusionnels (même s'ils ne sont pas frères), l'amour d'un père (même s'il n'est pas père !), l'amour tout court, la bienveillance, la tolérance, la dépendance, le rejet d'un monde pour un idéal, la rancœur, et puis les arbres ! Les arbres ont une place prépondérante dans ce roman. Ils sont là, témoins du temps qui passe. Leurs racines s'entremêlent et leur réseau permettra aux plus jeunes de grandir et de prendre de la hauteur.
J'ai adoré ce roman ! Ce fut vraiment une très jolie lecture aussi bien sur l'histoire en elle même, sur la construction du roman voulue par l'auteur, et sur l'air de la forêt qu'il véhicule.
Quelques extraits :
"Moi je rêve surtout d'arbres. Des arbres que j'ai connus. D'autres que je ne connais pas encore. Parfois ils me viennent en aide, parfois ils me tombent dessus. Parfois je les plante, parfois je les coupe. Mais toujours ils sont là. Je crois que si on m'ouvrait la tête, on trouverait un gros ballot de racines toutes emmêlées."
"Le bois, c’est du temps capturé. Une carte. Une mémoire cellulaire. Une archive. C’est pourquoi, d’après Liam, les menuisiers-charpentiers comme lui ne manqueront jamais de travail. Parce que les gens voudront toujours avoir du bois près d’eux, que ce soit dans leurs maisons, au sol, aux murs ou au plafond, dans les cannes sur lesquelles ils s’appuient en toute confiance, leurs plus beaux instruments de musique, les objets transmis de génération en génération et les vieilles chaises à bascule, et – plus significatif encore – les boîtes qui facilitent leur voyage en terre."
"Le meilleur moment pour planter un arbre, c’était il y a vingt ans. A défaut de quoi c’est maintenant."